Archives pour la catégorie Pause surréaliste

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dans les coulisses de l’atelier des possibles le poisson-lune argenté joue du chalumeau à hydrogène atomique car il rêve de déclarer sa flamme à la tortue géante des îles de la Loire mais la tortue ligérienne qui n’est pas la belle au bois dormant préfère jouer au loup solitaire ou pourquoi pas avec la girafe solidaire qui a traversé tant de pays franchi tant d’obstacles et qui est enfin arrivée à bon port à Ratiatum ville-étape dans laquelle juste au fond d’une petite cour pavée de bonnes intentions de la rue Alsace-Lorraine toutes les énergies créatrices battent le fer pendant qu’il est chaud à mille degrés plus ou moins car c’est la température idéale pour transformer un caddie en fauteuil à roulettes idéale pour découper des morceaux choisis de bois d’aubaine idéale pour percer des silences en or massif poncer des imperfections de quelques dixièmes de millimètre d’épaisseur humaine souder des débris de métal hurlant un jour de pleine lune sous laquelle grâce à l’alchimie divine on peut voir naître des êtres hybrides de chair et d’os des êtres soudés les uns aux autres solidaires et fiers exhibant leur masque de dragon leurs lunettes astronomiques leurs gants usés par la rouille et recouverts de poussière d’étoiles de mer rouge qui se dépose à l’infini dans le cyclo-simulateur où l’on tourne en boucle des images vidéo de la vie ardente d’un poisson-lune argenté

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je me suis assoupi au pied de l’arbre des droits humains un arbre à feuilles radicales et larges d’esprit à feuilles lancéolées guidant le peuple qui s’est donné rendez-vous au rond-point d’exclamation au rond-point d’interrogation au rond-point sur les i qui n’en finissent pas de tourner en rond en sens inverse des aiguilles d’une montre de plongée libre sans bouteille ni masque mais avec gilet de sauvetage en marée humaine avec gilet d’un rouge magenta avec gilet d’un jaune citron pressé d’en finir avec l’ancien monde d’un jaune Poussin peignant le Massacre des Innocents qui ne rêvent pourtant que d’un bal masqué de Venise d’un bal de sirènes d’usine où dansent chimères et mélusines d’un bal populaire place Royale devenue place du Peuple où le roi est nu où le roi Ubu à satiété toutes les paroles de ses sujets sans verbe ni compliment sans adjectif ni article de loi Divine comédie jouée aux portes de l’enfer chaque année au printemps des poètes au printemps des révolutions coperniciennes si pernicieuses aux yeux des oligarques vaccinés contre le grand soir dont rêvent les gilets jaune citron pressés de faire table rase du passé composé seulement pour quelques-uns

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dans le jardin d’à côté les âmes exilées s’enivrent des myriades de pétales du souvenir qui recouvrent les allées du pouvoir à sens inique et dessinent un tapis pourpre d’émotion de sueur et de sang bouillonnant de rêves et d’espoirs de craintes et d’illusions éphémères s’évanouissant dans l’aurore australe d’une pluie battante une pluie de protons d’exécution contrariés par un festival de couleurs et de senteurs où la rose pourpre du Caire côtoie un essaim de fleurs de java et les tournesols d’un Van Gogh rejoignant Gauguin au bal du crépuscule des idoles qui sous leur masque d’Arlequin se délectent secrètement d’un bouquet final d’étoiles aux reflets d’émeraude aux reflets d’argent blanchi aux îles crocodiles dans lesquelles les pêcheurs esthètes tuent leur temps à relever des casiers vierges des casiers à bouteilles jetées à la mer des sarcasmes des bouteilles d’or massif gisant dans les sombres abysses où repose Frida Kahlo à la colonne brisée en mille fragments de vers aux rimes féminines et masculines aux rimes embrassées au coin de la rue des soupirs aux rimes croisées un soir d’été indien aux rimes suivies par l’ombre d’un doute glissant sur l’onde radiophonique qui franchit la frontière invisible entre le monde du silence et les échos ricochant sur la vague de fond mystique du cercle des poétesses disparues puis réapparues entre trois points de suspension télescopique inondant d’une lumière inspiratrice le jardin des délices

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sous les pavés de pierre de lune rousse c’est une plage de sable fin qui glisse entre les six doigts translucides de l’humanoïde aux mille souvenirs bien ancrés dans sa mémoire cache-cache où s’effleurent des corps célestes munis de lampes hallucinogènes où se bousculent des chimères sans queue ni tête où un quartet de soldats de plume sonne la charge en coulisse sous un ciel de cuivres sous une trompette de neige sous une averse de trombones à piston à double effet de surprise sous une grêle de croche-pieds sous un cyclone polaire de demi-tons en boîte de nuit sous un orage de notes piquées au vif du sujet de la phrase musicale que l’humanoïde claironne dans l’espoir du grand renversement des tables rondes en langue de bois non équitable dans l’espoir du grand effondrement de la tour infernale dans l’espoir d’un nouveau paradigme sans dogmes dans l’espoir de trouver sous les pavés de pierre de lune noire une plage de sable sans fin ni fond

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d’un aéronef à voile aux couleurs de l’arc-en-ciel l’intrépide amazone de turbulence saute sur son cheval ailé puis tombe de haut quand elle atterrit au Zadiland qu’elle parcourt de long en large et de haut en bas en passant par les quatre coins d’une vaste pièce de théâtre de rue à sens unique en son genre d’une rue à sens interdit d’interdire de cultiver son jardin au cœur d’une zone à défendre la place du peuple au cœur d’une zone à fendre du bois pour chauffer l’eau du bain-marie bouillant durant d’interminables nanosecondes au cœur d’une zone à désirer la sobriété monacale d’un vol de macareux sous une pluie de perles du Japon médiéval où les sept samouraïs de Kurosawa engloutissent des financiers leurs parachutes dorés et paradis fiscaux avec pendant que l’amazone d’influence laisse frémir à feu doux la révolution des utopies libertaires en remuant à l’infini jusqu’à ce qu’une crème brûlée d’étoiles de mer de java des bombes atomiques embrase une mousse glacée d’étoiles filantes au crépuscule des idoles enfin repues

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sous une lune de miel de montagne russe la jeune australopithèque issue des beaux quartiers d’orange amère du miocène supérieur songe à la pinacothèque andalouse qu’elle a visitée le jour d’après la nième extinction de l’oiseau rare qu’Audubon immortalise dans son carnet de dessin au nombre infini de feuilles d’eucalyptus pendant que l’homo sapiens sapiens fervent chasseur d’images d’Epinal et farouche cueilleur de citrons verts de la Nouvelle-France orientale cherche à l’aide de son céleste gépéesse à se rendre au musée du Prado de Madrid pour y dérober le tableau en deux parties de Dürer celui qui représente Adam et Ève celui où le serpent présente une pomme tentation à Ève alors que les papilles papales d’Adam rêvent d’engloutir une religieuse parfumée au café allongé dans le Jardin des délices une religieuse parfumée au café serré contre son prochain mais Ève n’est pas dupe car la pomme d’Adam n’est que le fruit de l’imagination des papesses et sous-papes ayant traversé les siècles des siècles sans emprunter les passages réservés aux piétons du Mont-de-Piété situé juste en face de la colline de Montmartre où chaque soir l’impavide abbesse de la rue des Martyrs s’enivre d’un lait d’ânesse avec son amie australopithèque issue des beaux quartiers d’orange sanguine du miocène supérieur

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une jeune dame âgée de cent septante-six ans aux cheveux poivre et sel de mer rouge tente une énième fois de nager dans le sens inverse des aiguilles d’une montre afin de remonter à contre-courant le tourbillon de l’onde radio portative qui diffuse à satiété du Satie répétant en boucle d’oreille grande d’attention ses Gymnopédies si légères qu’elles finissent par rejoindre un nuage de lait de riz long de trois mètres et quelques et des poussières d’étoiles de mer de Chine que la jeune dame aux six doigts agiles cueille une à une au rythme de la mélopée des gastéropodes et pendant que ces derniers de la classe des mollusques glissent telle une procession étrusque le long d’une tapisserie royale représentant les Nymphéas Claude Monet au teint lumineux par intermittence entame son ultime plongée en apnée dans une eau vaguement huileuse où un vert chartreuse côtoie un turquoise à l’instant même où le Nautilus du capitaine Némo évite de sang-froid l’imposante nageoire caudale d’une baleine boréale perdue dans les Limbes du Pacifique océan pigmenté d’une myriade de polymères de couleur rouge sang qui s’échouent avec mélancolie sur les rivages intérieurs d’une jeune dame âgée de cent septante-six ans et des poussières

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sept minutes après s’être enfuie de l’île du diable la coccinelle mutine conservant sous ses élytres divins son pense-bête à bon dieu ou à bonne déesse survole la baie des anges déchus puis se pose en hélicoptère sur le toit végétalisé de la tour de Babel comme le jour d’après l’effondrement du bloc-notes de musique de requiem car la coccinelle experte en collapsologie l’a prédit et redit devant son auditoire tout ouïe qui est prêt à boire les paroles du coléoptère mais brûle aussi d’impatience de s’enivrer du nectar divin rouge ou blanc qui est servi après la conférence au sommet de la tour infernale puis soudainement les convives immortels emportés par la vague à l’âme aiguisée pour couper à travers les champs du possible plongent dans une rivière débordant de lucidité et de cadavres exquis qui glissent sur les neiges éternelles du Kilimandjaro et finissent par fondre dans le livre de sable dont le nombre de pages infini n’en finit pas d’intriguer le cercle des poètes disparus puis réapparus lors de la Fête nautique d’un Prévert poursuivant son activité de collage au grand dam des bien-pensants de tout poil à langue de bois

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avec la patience du diable la tortue sanguine des îles flottantes de l’Océanie attend l’aurore pour disposer malicieusement sa douzaine d’œufs bouillonnante sous un lit de sable vanillé sur lequel se prélassent des amandes caramélisées par le feu ardent de l’astre diurne qui ce jour-là a rendez-vous avec la lune rouge écrevisse pêchée dans les eaux troubles des songes amers où nage furtivement la murène cosmopolite qui envie l’homme-grenouille qui veut se faire aussi gros que le bœuf mais dépassé d’une courte tête par les événements l’homme qui a des grenouilles vert clair à pois rouges dans le ventre et des cadavres exquis chamarrés gonfle d’insolence d’insomnie et de souvenirs émus puis se mue en chasseur-cueilleur de champignons hallucinogènes engloutis en un éclair par la tortue psychédélique qui admire le ciel et s’extasie devant la formation d’un nuage de lait de coco chanel dont la petite robe noire jaillit de la machine à coudre avec parapluies de Cherbourg pour les demoiselles de Rochefort qui ne comprennent qu’à demi-mot la mise en scène occulte d’un Dionysos en train à grande vitesse d’ériger un tétracontagone à quarante sommets enneigés injustement inaccessibles aux heures de pointe et d’embouteillage de vin de grand cru récolté sous une lune rouge écrevisse pêchée lors de la grande marée du siècle de l’infini sevrage

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depuis la nuit des temps le vieil homme et l’enfant observent la migration de l’ours blanc bipolaire de rien n’y comprendre et l’air de perdre le Nord et la raison pour laquelle la banquise n’est plus son exquise demeure un jour ou l’autre car l’avenir de l’ours blanc crème fouettée par les crimes climatiques rétrécit comme une peau de chagrin sous la voûte étoilée au centre de laquelle la Grande Ourse si fébrile a besoin à toute heure d’un défibrillateur afin que les pulsations aphrodisiaques du Grand Chariot dépassent le rythme subliminal du troisième mouvement des quatre saisons de Vivaldi car c’est la saison blanche et sèche qui amène les migrants à quitter bon gré mal gré le rivage des Syrtes à l’aide de leurs rêves pneumatiques gonflés à l’espoir aérien que pour espérer jouir du réchauffement empathique du cœur de l’homo habilis dont le visage en trompe-l’œil et l’expression empreinte de faux-semblants s’accordent pour créer l’illusion du mouvement perpétuel des étoiles de mer de glace que le vieil homme admire pendant que l’enfant au regard vitreux fond en larmes de verre qui se brisent en mille éclats stellaires que respire l’ours en peluche de propylène à repriser l’étoffe meurtrie de la banquise

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